Курс французского языка в четырех томах

Вид материалаДокументы

Содержание


Le printemps en bretagne...
Mémoires d'Outre-Tombe.
Et l'automne dans le midi
La touraine
Quelques-uns de ses fils, d'ailleurs, comptent parmi les plus grands écrivainsqu'ait produits la France: Rabelais, Descartes, Vi
Alfred de vigny.
Harnais de naissance et économiste averti, ANDRÉ SIEGFRIED a mis en pleinelumière les caractères essentiels de sa ville natale.
André siegfried.
Nostalgie de la flandre
Albert samain.
Adieux a la meuse
Charles péguy.
Les alpes
R. frison-roche.
Le massif central
Thérèse parait attentive. Son visage s'éclaire.
Jules romains.
La foire de banon
Подобный материал:
1   2   3   4   5   6   7   8   9   ...   32
раздел империи, созданной дедом. По этому разделу ему досталась центральная ее
часть, включающая Лотарингию и Италию. 4. Цветочные или овощные грядки.
5. Искусственные террасы, устроенные с помощью каменных подпорных стенок на
склонах холмов для посадки растений. 6. Часть средиземноморского побережья
Франции от Ниццы до границы с Италией.

Вопросы:

*Que pensez-vous de cette affirmation? Et considérez-vous la France comme une
puissance plutôt
atlantique ou plutôt continentale?

**Cherchez dans l'histoire (le France des faits qui illustrent la triple orientation définie
dans cette page.


LE PRINTEMPS EN BRETAGNE...

Située à mi-chemin du Pôle et de l'Equateur, soumise à l'influence adoucis-
sante des mers qui l'entourent, garantie des froids excessifs par les montagnes
qui la protègent à l'est, la France bénéficie, dans son ensemble, d'un climat
essentiellement tempéré.


Aussi, malgré des différences évidentes, retrouve t-on une semblable lumière,
une même ardeur de vie dans des provinces aussi éloignées l'une de l'autre que
la Bretagne et la Provence.


Le printemps, en Bretagne, est plus doux qu'aux environs de Paris et
fleurit trois semaines plus tôt. Les cinq oiseaux qui l'annoncent,
l'hirondelle, le loriot, le coucou, la caille et le rossignol, arrivent avec des
brises qui hébergent' dans les golfes de la péninsule armoricaine. La terre
se couvre de marguerites, de pensées, de jonquilles, de narcisses, d'hya-
cinthes, de renoncules, d'anémones comme les espaces abandonnés2 qui
environnent Saint-Jean-de-Latran et Sainte-Croix-de-Jérusalem, à Rome.
Des clairières se panachent d'élégantes et hautes fougères; des champs de

15

genêts et d'ajoncs resplendissent de leurs fleurs qu'on prendrait pour des
papillons d'or. Les haies, au long desquelles abondent la fraise, la fram-
boise et la violette, sont décorées d'aubépine, de chèvrefeuille, de ronces
dont les rejets bruns et courbés portent des feuilles et des fruits
magnifiques. Tout fourmille d'abeilles et d'oiseaux; les essaims et les nids
arrêtent les enfants à chaque pas. Dans certains abris, le myrte et le laurier-
rosé croissent en pleine terre, comme en Grèce; la figue mûrit comme en
Provence; chaque pommier, avec ses fleurs carminées, ressemble à un gros
bouquet de fiancée de village*...

CHATEAUBRIAND. Mémoires d'Outre-Tombe. (Publiés en 1849-1850).
Примечания:


1. Поселяются на проживание на некоторое время. 2. Это написано в 1-ой
половине XIX в.

Вопросы:

* Chateaubriand a largement contribué à introduire le pittoresque dans la prose
française. Ce texte n'en offre-t-il pas une preuve?


...ET L'AUTOMNE DANS LE MIDI

Au-dessus de la Loire, il a la vendange assez austère, le pauvre homme
de la glèbe, à tout moment puni dans son œuvre grêlée, noyée, transie,
attaquée par l'invisible. Le jour même de la récolte est un jour déjà
raccourci, un labeur poursuivi par la mauvaise humeur d'octobre, une tâche
pour laquelle la vigneronne noue son fichu, le vigneron boutonne sa veste
de laine. Seul le Midi connaît, pendant qu'il vendange, l'expression d'une
joie qui participe du climat, de la saison intacte, de la prompte et parfaite
maturité du raisin, parfois si caressé du soleil qu'il appelle dans les vignes,
fin août, ses milices bavardes1. Il y a quelques années, tout le département
du Var — et, je pense, ses voisins — dut dépouiller, à partir du 26 août, les
ceps chargés, sauver les grappes longues et lourdes qui traînaient sur la
terre et s'y brûlaient. Que de sucre et de flamme, quel bleu de pruine2 sur
ces raisins pansus, quel mauve de violette sur l'épiderme du grain ovale
qu'on nomme olivette3!... La clairette3 est rosée et ronde, le picardan"
luxueux pèse au cep, le muscat blanc doré et un petit pineau tout noir, si
l'on tarde, crèvent leur peau fine et se vident de leur richesse...

Là-bas, les vendangeuses blanches, à cheveux noirs, se couvrent de

16

grands chapeaux, rabattent leurs manches jusqu'aux poignets, et font les
peureuses par coquetterie: «Vé, la tarente4! Bonne Mère, un serpent!» Par
coquetterie aussi les hommes «tombent» la veste et jettent la chemise....
Les guêpes, ivres et sans défense, ce collent aux comportes5 poisseuses; le
soleil de septembre vaut celui d'août.... Le vieux pressoir à bras visite
encore Saint-Tropez, s'arrête de seuil en seuil, entouré de ses essaims
d'enfants et de mouches blondes. De ses sangles pourpres, de son bois teint
d'un violet indélébile coule, engorgé de caillots, le vin neuf à qui chacun

peut tendre son verre*

COLETTE. Automne (1941).

Примечания:

1. C'est-à-dire: les vendangeurs — Сборщики винограда. 2. Восковой налет на
некоторых плодах. 3. Сорт винограда. 4. Слово, означающее на юге Франции
"ящерица". 5. Деревянные чаши, в которых перевозят с виноградников собранный
виноград.

Вопросы:

*Quels sont les divers éléments qui donnent couleur et saveur à ce texte?

L'ILE-DE-FRANCE

S'il estunefrovince éminemment française, c'est assurément l'Ile-de-France,
puisque c'est autour d'elle que s'est constituée l'unité du pays. EMILE HEN-KIOT
évoque ici dans la limpidité d'une nuit exquise, les êtres familiers, fleurs,
arbres, oiseaux, qui sont comme les témoins de sa jeunesse, de toute sa vie.


La nuit, le printemps. J'arrive: je n'y' pensais plus dans le feu des
phares", mais cette clarté sur les murs des maisons blanches, de la vieille
ferme d'ocré délavé ; ce dur triangle d'ombre noire sur le côté de la tour
dans le contre-jour; et sur la prairie, cette autre ombre, molle, d'arbre
profilé, c'est la pleine lune. Magnifique ciel tout d'argent, bleuté. Le disque
blafard, éclatant, dans sa rondeur parfaite. J'éteins les phares, j'arrête le
moteur. Le merveilleux silence, tout à coup. О mon cher pays! La lune tout
entière sur toi, pour te baigner et t'éclairer, pour te faire cette nuit
lumineuse, pleine d'insensibles couleurs. La tuile rousse des toits reste
rousse; rosé la cheminée de brique; bleu sombre l'ombre au pied des arbres.
Les rosés presque noires sentent bon, et la lune met sur chacune de leurs
feuilles vernies sa goutte de lueur, diamant. Les vitres brillent, à la fenêtre

17

du pigeonnier. Toute la lune est dans mon jardin, la nuit est de la fête.
Comme cela sent bon: l'eau, la feuille, la brame, la mousse, l'herbe, la terre
mouillée. Je croyais percevoir délicieusement le silence. Il n'est fait que
d'un long chuintement4 dans la disparition des bruits du jour. Un très léger
vent fait un friselis5 à travers les feuilles. Je n'ose pas espérer le rossignol,
ce serait trop beau; mais ce n'en est pas la saison. Ce grand appel pourtant,
si triste: la hulotte6. Voilà cinquante ans que je la connais; elle ou les siens
qui l'ont précédée dans ce trou élevé du sycomore. Hulotte de toujours,
éternelle; qui est toujours là. Symbole de durée, illusion de ce qui ne
change pas.... Mais, hélas! ce soir je suis seul, avec mes fantômes, dans la
maison vide. Je n'ai pas fermé les volets, la lune amicale7 entre dans la
chambre.

A quelle époque vient-il donc? Voici la fin avril8, le début mai8. Il
devrait être là. C'est lui au petit jour qui me réveille: le coucou, entendu au
loin, dans le fond des bois. Le coucou.

Jules Renard9 dirait qu'il dit: «Coucou!» Moi, ce n'est pas ce chant, très
limité, qui m'intéresse. C'est ce flot en moi qu'il déclenche, aussi loin dans
mes souvenirs que dans l'éloignement, la hauteur, la voix du menu chanteur
invisible, au corps plus petit que le son puissant qu'il émet. Le coucou
chante, et c'est mon enfance étonnée, les promenades dans le petit bois, la
croisée10 au matin ouverte; et dans l'ennui de la vie si lente et comme
suspendue, où tout est encore à attendre, il y a ce chant bête et narquois" ,
ce bruit de la nature; et l'oiseau que je ne verrai jamais*.

EMILE henriot. Ile-de-France (1956).
Примечания:

\. Expliqué plus loin par la pleine lune. 2. De l'auto. 3. Цвета вылинявшей охры.
4. Легкий шелест, пришепетывание. 5. Трепетание, легкая дрожь. 6. Серая сова,
неясыть. У нее есть еще одно название: chat-huant. 7. Укороченная цитата из
Вергилия: amica silentia lunae. 8. Expressions courantes (sans de) dans la langue
quotidienne. 9. Жюль Ренар (1864 - 1910) — французский писатель, для стиля
которого характерна лаконичность и точность деталей. 10. Окно. 11. Иронический,
насмешливый, лукавый.

Вопросы:

* De quoi est faite la poésie de ce passage? — Essayez, en particulier, dt-montrer la

musicalité, la fluide harmonie du premier paragraphe.

18

LA TOURAINE,
«JARDIN DE LA FRANCE»


Elle est le cœur du pays comme Paris en est la tête. Et même, 'par le calme et
la pureté de ses paysages, par la. lenteur sinueuse des fleuves qui la traversent,
par la richesse de ses jardins et la variété de ses vignobles, par la douceur de
l'air qu'on y respire et la grâce des châteaux qui font l'honneur des bords de la
Loire, du Cher et de l'Indre, par la qualité du langage qui s'y parle, elle donne
peut-être de la France une image plus exacte, on voudrait dire plus
authentique.


Quelques-uns de ses fils, d'ailleurs, comptent parmi les plus grands écrivains
qu'ait produits la France: Rabelais, Descartes, Vigny, Balzac.


Connaissez-vous cette contrée que l'on a surnommée le jardin de la
France, ce pays où l'on respire un air si pur dans les plaines verdoyantes
arrosées par un grand fleuve? Si vous avez traversé, dans les mois d'été, la
belle Touraine, .vous aurez longtemps suivi1 la Loire paisible avec
enchantement, vous aurez regretté de ne pouvoir déterminer, entre les deux
rives, celle où vous choisirez votre demeure, pour y oublier les hommes
auprès d'un être aimé. Lorsqu'on accompagne le flot jaune et lent du beau
fleuve, on ne cesse de perdre ses regards dans les riants détails de la rive
droite. Des vallons peuplés de jolies maisons blanches qu'entourent des
bosquets, des coteaux jaunis par les vignes ou blanchis par les fleurs du
cerisier, de vieux murs couverts de chèvrefeuilles naissants, des jardins de
rosés2 d'où sort tout à coup une rosé élancée, tout rappelle la fécondité de
la terre ou l'ancienneté de ses monuments, et tout intéresse dans les œuvres
de ses habitants industrieux. Rien ne leur a été inutile: il semble que dans
leur amour d'une aussi belle patrie, seule province de France que n'occupa
jamais l'étranger3 ils n'aient pas voulu perdre le moindre espace de son
terrain, le plus léger grain de son sable. Vous croyez que cette vieille tour
démolie n'est habitée que' par des oiseaux hideux de la nuit? Non. Au bruit
de vos chevaux, la tête riante d'une jeune fille sort du lierre poudreux,
blanchi sous la poussière de la grande route; si vous gravissez un coteau
hérissé de raisins, une petite fumée vous avertit tout à coup qu'une
cheminée est à vos pieds; c'est que le rocher même est habité, et que des
familles de vignerons respirent dans ses profonds souterrains, abritées dans
la nuit par la terre nourricière qu'elles cultivent laborieusement pendant le
jour. Les Tourangeaux sont simples comme leur vie, doux comme l'air
qu'ils respirent et forts comme le sol puissant qu'ils fertilisent. On ne voit
sur leurs traits bruns ni la froide immobilité du Nord ni la vivacité

19

grimacière du Midi; leur visage a, comme leur caractère, quelque chose de
la candeur du vrai peuple de saint Louis (...); leur langage est le plus pur
français, sans lenteur, saris vitesse, sans accent;' le berceau de la langue est
là, près du berceau de la monarchie*.

ALFRED DE VIGNY. Cinq-Mars (1826).
Примечания:


1. Le futur antérieur, moins affirmatif que le passé composé, s'accorde ici avec l'hypo-
thèse (si...) = sans doute avez-vous suivi.. 2. Турень славится своими розами.
3. Это произведение написано в первой трети XIX в. После войны 1870 г. и во Вторую
мировую войну Турень была оккупирована немецкими войсками.

Вопросы:

*Essayes de montrer que l'a.isa.ace du style, le rythme et la douceur des phrases, leur
ampleur harmonieuse s'accordent bien avec la sérénité et la sagesse que Vigny reconnaît
aux habitants de la Touraine.


LE HAVRE

S» situation à l'estuaire de la Seine fait du Havre un port à la fois maritime et
fluvial,
dont le rôle peut-être le plus important consiste à établir la liaison
entre Paris et la mer. Aussi, au même titre que Bordeaux ou Marseille, peut-il
être regardé comme une capitale provinciale.


Harnais de naissance et économiste averti, ANDRÉ SIEGFRIED a mis en pleine
lumière les caractères essentiels de sa ville natale.


L'atmosphère du Havre s'exprime tout entière dans le vent d'ouest, tout
chargé d'océan, qui tantôt déverse sur l'estuaire des flots d'encre, et tantôt,
lavant complètement le ciel à l'occident, ne laisse plus du côté du large
qu'un immense horizon de clarté, ouvert sur l'infini. Venir au Havre
autrement que par vent d'ouest, il me semble que c'est ne pas y être venu!
(Les Anglais — ces voisins — réagissent de même, grelottants, rétrécis et
misérables quand souffle, de la Mer du Nord, le beastly East wind.)

Le vent de la Manche, en effet, transfigure tout. Les couleurs de la rade
sont parmi les plus belles du monde, les plus riches, les plus changeantes,
les plus nuancées. Ce fut l'avis d'une pléiade de peintres illustres, qui ne
pensèrent pas pouvoir trouver plus beau sujet d'étude: Boudin, Millet,
Claude Monet* doivent être considérés comme des Havrais d'adoption, et
si Monet nous a quittés pour d'autres cieux. Boudin est jusqu'à la fin
demeuré fidèle à l'estuaire. Les verts de jade de nos jours de tempête sont

20

inimitables, comme l'azur salin des ciels de noroît1. Laissons pourtant là
ces nuances: ce qui fait vraiment l'atmosphère de ce port, c'est l'ouverture
sur le grand large, ouverture symbolique, car il s'agit d'une ville où l'on
regarde vers le dehors, d'une fenêtre ouverte sur les océans et les continents
(...).

Par ses relations d'affaires, par le champ de ses intérêts, Le Havre est
non seulement international mais mondial. Les produits qui servent de base
à son activité commerciale, maritime et boursière constituent, à eux seuls,
la plus prestigieuse leçon de géographie. Même sans être jamais sorti de
chez lui, un Havrais est en contact direct avec l'Amérique, l'Afrique, l'Asie,
l'Océanie. Enfant, je me revois guettant du haut de la côte l'arrivée des
bateaux sur la rade: l'expérience m'avait enseigné la périodicité de leurs
retours; je savais aussi d'où ils venaient et par conséquent qu'il existe
d'autres pays et d'autres climats. Combien de Français ont appris dans les
livres que le monde extérieur existe, mais ne le savent pas véritablement!
Pour les Havrais, ce monde lointain est une réalité.

Cette coexistence du large et de la plus terrienne des provinces
françaises donne au Havre un équilibre singulier. Le ton est cosmopolite à
beaucoup d'égards: il y a des Anglais, des Américains, des Suisses, des
Hollandais, des Scandinaves, et beaucoup de Havrais ont une origine
étrangère. Mais la tradition du territoire s'exprime dans de vieilles familles,
spécifiquement normandes, qui demeurent distinctes, et c'est ainsi que
l'esprit normand, qui est peut-être le véritable esprit navrais, reparaît
toujours, comme une sorte de génie familier. Il nous préserve des
exagérations, des folies et des fanatismes; sa pointe d'ironie nous empêche
de prendre au tragique ce qui doit être pris au sérieux: il faut, pour vivre,
avoir le pied sur la terre et je ne crois pas qu'à cet égard on puisse mieux
choisir que le sol normand. Quand le tragique survient — et le destin nous
a rudement traités de ce point de vue — nous retrouvons la vitalité d'une
race qui a beaucoup de siècles derrière soi, qui sait reconstruire comme elle
a su conquérir (...).

Je ne connais pas de cité dont les habitants aient davantage une
conscience collective des conditions de son existence. Je me remémore à
ce sujet mes souvenirs d'enfance quand, vers 1885, j'avais dix ans: tous les
gens qui m'entouraient, que ce fussent les miens, les amis de la maison, les
associés ou collaborateurs de mon père, les serviteurs et leurs familles,
tous, oui tous, vivaient de l'échange, de l'activité commerciale et maritime
du port, et tous surtout en avaient conscience. Mon père, mon oncle étaient
importateurs de coton, le mari de notre concierge était pilote2 les parents de

21

notre cuisinière étaient employés de la «Transatlantique3», les visiteurs qui
sonnaient à notre porte ou s'asseyaient à notre table étaient courtiers,
ingénieurs, marins, négociants.... Par les conversations que j'entendais., au
salon ou à la cuisine, je savais que le transatlantique venait d'arriver de
New York (je l'avais du reste vu sur la rade), que tel bateau des «Chargeurs
réunis»4 était en retard, qu'il y avait eu un killing frost5 dans l'Arkansas,
qu'il y avait une hausse du coton en Bourse, que le projet d'agrandissement
du port allait être discuté à la Chambre et qu'il était combattu par les
Rouennais6. Tout cela mettait en jeu bien des intérêts et combien divers,
mais tous ces Havrais se sentaient solidaires, dès qu'il s'agissait d'entretenir
l'activité de l'Établissement maritime qui était pour eux l'équivalent d'une
petite patrie. Les sirènes du port n'avaient-elles pas, pour chacun d'eux,
bercé la veille le repos de la nuit**?

ANDRÉ SIEGFRIED. Géographie poétique des cinq Continents (1952).
Примечания:

1. Норд-вест, влажный северо-западный ветер, искажающий краски. 2. Лоцман.
3. Известная судоходная компания "Compagnie Générale Transatlantique". 4. Судо-
ходная компания. 5. Убийственный мороз (англ.) 6. Город Руан является соперником
Гавра.

Вопросы:

* On étudiera la composition (le ce morceau. à la description proprement dite?
** Quel intérêt les
souvenirs personnels apportent-il?',

NOSTALGIE DE LA FLANDRE

Montrée riche en charbon et en textiles, «pays noir» et vastes champs de lin,
la Flandre s'étend sous un ciel pâle. Mais ce pays du Nord ne manque pas
d'attrait, ni surtout d'âme.


Mon enfance captive a vécu dans des pierres,
Dans la ville où sans fin, vomissant le charbon,
L'usine en feu dévore un peuple moribond.
Et pour voir des jardins, je fermais les paupières....

J'ai grandi, j'ai rêvé d'orient, de lumières,
De rivages de fleurs où l'air tiède sent bon,
De cités aux noms d'or, et, seigneur vagabond,
De pavés florentins où traîner des rapières.

22

Puis je pris en dégoût le carton du décor,

Et maintenant, j'entends en moi l'âme du Nord

Qui chante, et chaque jour j'aime d'un cœur plus fort

Ton air de sainte femme, ô ma terre de Flandre,
Ton peuple grave et droit, ennemi de l'esclandre2,
Ta douceur de misère où le cœur se sent prendre,

Tes marais, tes prés verts où rouissent3 les lins,
Tes bateaux, ton ciel gris où tournent les moulins,
Et cette veuve en noir avec ses orphelins*...,

ALBERT SAMAIN. Le Chariot d'Or (1901).
Примечания:


1. Tour concis, très usuel: où je pourrais traîner... pour y tramer. 2. Скандал, ссора.
3. ... где мокнет лен.

Вопросы:

* Expliquez avec précision par quels sentiments successifs est passée l'âme du poète.
Quels éloges fait-il de sa terre natale?


ADIEUX A LA MEUSE

Des montagnes qui se dressent sur son sol, la France envoie tout un réseau
complexe de fleuves et de rivières aux différentes mers dont elle est bordée: la
Seine s'écoule des hauteurs de la Côte-d'Or jusqu'à la Manche; du Massif
Central, la Loire parcourt mille kilomètres avant de se jeter dans l'Océan; la
Garonne joint les Pyrénées à l'Atlantique; et le Rhône, torrent échappé des
Alpes, s'y creuse une longue vallée avant de se précipiter dans la Méditerranée.
La Meuse, elle, avant de passer en Belgique, puis en Hollande, traverse la
Champagne et la Lorraine, qu'elle met ainsi en communication avec nos
voisins du Nord. C'est assez dire son importance sur le plan géographique et
économique. Et puis, littérairement, elle a inspiré à CHARLES PÉGUY un de ses
poèmes les plus émouvants: les adieux de Jeanne d'Arc au fleuve qui l'a vue
naître et dont les flots ont bercé son enfance.


Adieu, Meuse endormeuse et douce à mon enfance,
Qui demeures aux prés, où tu coules tout bas. i.

Meuse, adieu: j'ai déjà commencé ma partance'
En des pays nouveaux où tu ne coules pas.

23

Voici que je m'en vais en des pays nouveaux:
Je ferai la bataille et passerai les fleuves;
Je m'en vais m'essayer à de nouveaux travaux,
Je m'en vais commencer là-bas les tâches neuves,

Et pendant ce temps-là, Meuse ignorante et douce,
Tu couleras toujours, passante accoutumée,
Dans la vallée heureuse où l'herbe vive pousse,

О Meuse inépuisable et que j'avais aimée.
(Un silence.)

Tu couleras toujours dans l'heureuse vallée;
Où tu coulais hier, tu couleras demain.
Tu ne sauras jamais la bergère en allée ,
Qui s'amusait, enfant, à creuser de sa main
Des canaux dans la terre, — à jamais écroulés.

La bergère s'en va, délaissant les moutons,
Et la fileuse va, délaissant les fuseaux.
Voici que je m'en vais loin de tes bonnes eaux,
Voici que je m'en vais bien loin de nos maisons.

Meuse qui ne sais rien de la souffrance humaine,
О Meuse inaltérable et douée à toute enfance,
О toi qui ne sais pas l'émoi de la partance,
Toi qui passes toujours et qui ne pars jamais,
О toi qui ne sais rien de nos mensonges faux,

О Meuse inaltérable, ô Meuse, que j'aimais,

( Un silence.)

Quand reviendrai-je ici filer encor la laine?
Quand verrai-je tes flots qui passent par chez nous?
Quand nous reverrons-nous? et nous reverrons-nous*?

Meuse que j'aime encore, ô ma Meuse que j'aime**....

CHARLES PÉGUY. Jeanne d'Arc (1897).
Примечания:


l.Mon départ (archaïsme). Mais on dit encore: le navire est en partance (se prépare
à partir). 2. Qui s'en est allée.

24

Вопросы:

*Pour quelles raisons Jeanne a-t-elle ce regret de partir?

** Étudiez la musique de ce poème. A quelles intentions correspondent les artifices de
typographie employés ici?

LES ALPES

Frison-Roche exprime dans Premier de Cordée l'atmosphère de la haute
montaêne:
son héros, Pierre Servettaz, neveu d'un des meilleurs guides des
Alpes, a senti en lui l'irrésistible vocation de l'héroïsme, l'appel de la liberté.


Sous ses pieds, s'ouvre le trou sombre de la vallée profonde de mille
mètres et, en face de lui, la chaîne du Mont-Blanc, qui s'exhaussait
à mesure qu'il montait, a repris sa véritable dimension; la coupole
supérieure repose comme la voûte d'une cathédrale byzantine sur
l'architecture compliquée des Aiguilles, amenuisées par la distance. C'est
une forêt de pierres où pilastres, tours, campaniles, lanternes1
s'enchevêtrent et se hérissent, émaillés de névés2 glauques.

Les glaciers des Bossons et de Tacounaz, écaillés de crevasses trans-
versales, s'allongent et s'étirent paresseusement comme de gigantesques
sauriens.

Le froid augmente; Pierre claque légèrement des dents, mais il ne peut
se lasser d'admirer encore une fois ce lever du jour.

C'est comme si d'un coup tout devenait plus clair, plus frais, plus pur.
Une toute petite tache rosé s'est posée sur la cime sans qu'on sache d'où
venait la lumière; sans doute des lointains de l'est, maintenant phosphores-
cents et, en même temps que le jour naissait, l'air s'est fait plus léger. Pierre
voudrait chanter. Mais non! C'est tout son être qui chante mystérieusement
le renouveau de la vie. Il se lève, assure son sac sur l'épaule et, repartant
dans la fraîcheur, atteint la combe' du Brévent encore dans l'ombre, où les
gros blocs du clapier4 dessinent des formes étranges et familières; le jeune
montagnard marche fébrilement. Maintenant, il se faufile avec le sentier
complice sous un petit campanile déchiqueté, puis l'abandonne pour une
piste à peine marquée qui rejoint la base de la grande paroi du Brévent.

La face du Brévent est une ascension courte, facile pour un grimpeur de
classe, mais vertigineuse au possible; on y conduit généralement les
débutants ou encore les alpinistes qu'un guide veut «essayer» avant une
course importante; le rocher est très délité5 et nécessite de grandes
précautions.

25

Cette paroi Pierre l'a gravie bien des fois, et, s'il y retourne, c'est
justement parce qu'il sait fort bien qu'il ne pourra trouver meilleure pierre
d'essai: un homme sujet au vertige ne franchit pas la vire6 du haut de la
paroi. Et Pierre se reprend à douter, redoute l'échec qu'il pressent, perd sa
confiance... Sa démarche se fait plus hésitante. Il faut, pour aborder les
rochers, traverser un petit couloir herbeux très raide, les gazons mouillés
de rosée sont très glissants. En temps normal, Pierre aurait sauté en se .
jouant d'une pierre à l'autre. Pourquoi, aujourd'hui, n'avance-t-il qu'avec
précaution, plantant la pique de son piolet dans la terre pour assurer sa
marche, s'inclinant exagérément du côté de la montagne, au lieu de poser
son pied bien franchement et d'aplomb?

Quelqu'un qui le verrait de loin s'inquiéterait: «Voilà un débutant qui n'a
pas le pied sûr!» songerait-il.

R. FRISON-ROCHE. Premier de Cordée, (1948).
Примечания:


1. Разные формы скал: пилястр — плоский вертикальный выступ на поверхности
стены; кампанилла — колокольня, стоящая на некотором отдалении от церкви;
лантерн — башенка с отверстием (фонарем) сбоку. 2. Фирновый (уплотненный,
смерзшийся) снег. 3. Длинное и узкое ущелье. 4. Нагромождение каменных обломков
у подножья склона. 5. Растрескавшиеся и отслаивающиеся от воздействия воды
и морозов. 6. Тропа, вьющаяся по склону горы.

LE MASSIF CENTRAL

Jules Romains est né dans le Velay, J province dominée far le mont Mézenc.
Demeuré toujours fidèle à cet âpre pays, il en exprime admirablement l'étrange
et puissante beauté.


Emmanuel explique à Thérèse l'existence qu'elle mènera en pleine
montagne des Cévennes, quand il l'aura éposée.


THÉRÈSE, après un silence.
Je ne pourrai pas vivre ici.

EMMANUEL

Mais ce n'est pas ici que nous vivrons d'abord.
Notre père Hélier nous donne une maison
Qu'il possède dans la bruyère du Mézenc.
Nous y serons un village, et tout un royaume.

26

Thérèse parait attentive. Son visage s'éclaire.

Écoute-moi. C'est une grande maison basse
Qui s'enfonce à demi dans un creux de la lande,
Avec un long toit penchant qui rejoint le sol,
Et un seul arbre qui se répand sur le toit.
Alentour, aussi loin que peut porter la vue,
Tout est désert, tout n'est qu'une onde d'herbe rase
Ou que douée épaisseur de bruyère feutrée1.
Et tant d'espace ne s'étend jusqu'à personne.

Il n'y a pas un signe de possession.
Par endroits, une pierre plantée,

un genêt.

Dès septembre, il vient là-dessus de lents brouillards;
On est seul, comme au fond de son meilleur sommeil,
Et l'on voit tout à coup naître et fuir dans la brume
Un poulain libre qui galope sans nul bruit.
Et c'est la neige, après, qui commence à tomber.
Elle est tendre, au début, elle fond vers midi,
Laissant une rosée à la pointe des herbes.
Mais un beau jour d'octobre elle ne s'en va plus.
L'on cesse de voir l'herbe rase, et la bruyère,
Puis les pierres plantées,

et les genêts aussi.

Un nouveau sol pousse, avec de nouvelles formes,
Comme si une bête avait changé de peau,
Un sol neuf, qui est terre par la dureté,
Et qui est ciel, en même temos, par la lumière.

Peu à peu, la maison s'ensevelit.

On tâche

De garder un chemin libre devant le seuil,
Et la neige fait deux murailles qui grandissent.

Et puis, une nuit, il en tombe
Tellement, que le jour d'après
On renonce à prendre la pelle.

Il faut barricader la porte:
Une barre en haut, une en bas,

27

Et deux autres qu'on coince en terre
Pour épauler chaque battant.

THÉRÈSE, moitié souriant, moitié frissonnant.

Et tu veux me mettre en prison
Dans la neige du mont Mézenc?
Mais je mourrais, Emmanuel!

EMMANUEL, venant encore plus près d'elle.

La maison est alors aussi secrète et seule
Que si on se cachait à cent pieds sous le sol.
L'on n'entend plus que la fontaine intérieure
Couler infiniment dans l'auge de granit.

L'âme se plaît entre l'étable et la cuisine.

Il repose2, au plafond, sur des claies toutes noires,

Des jambons, du fromage et du lard pour plus de six mois.

Des bottes de saucissons pendent a la cheminée.

On bute au cellier sur des pommes de terre croulantes;

Deux armoires de chêne abritent mille fruits en rangs;
II se carre au grenier plus d'un sac de belle farine,
Et le foin dans la grange est entassé jusqu'aux chevrons3
Alors la maison s'emplit de la chaleur de l'étable.
L'eau semble tiède aux mains comme la laine des brebis.
Il ne vient un peu de jour que par la haute lucarne
Qui est auprès de l'arbre et que la neige n'atteint pas.
C'est une fente étroite et profonde comme une source.
Le jour qui en descend paraît un plaisir d'homme riche4,
Et on le recueille avec beaucoup de soin dans ses yeux.

Mais le soir une grosse lampe
Bourdonne au-dessus de la table,
Jusqu'à l'heure de s'endormir.

Les lits sont enfoncés dans une muraille de bois;

Ils vont loin, comme des trous d'insectes au cœur d'un vieil arbre.

Le sommeil y est plus enivrant que partout ailleurs,

Plus libre de la terre, plus entré dans l'autre vie;

Très bas, tout près de son visage:
28

Le sommeil, Thérèse, le sommeil,
et aussi l'amour*.

JULES ROMAINS. Cromedeyre-le-Vieil, IV, II (1920).
Примечания:


1. Имеется в виду, что на вересковых зарослях вереск образует упругий, плотный
(как войлок) слой. 2. Tour impersonnel. Le vrai sujet est: des jambons, du fromage et du
lard
(v. plus bas: il se carre). 3. Стропила крыши сходятся под острым углом в форме
буквы А. 4. То есть удовольствие редкостное и утонченное.

Вопросы:

* Montrez quelle poésie se dégage de ce style aux formes pleines et denses.

LA FOIRE DE BANON

Né à Manosque (Basses-Alpes), JEAN GIONO est le poète moderne de la